Relatio du Maître de l’Ordre au Chapitre général de Tultenango juillet 2022
Prot. n. 50/20/485 Tultenango 2022
Un temps de grâce
- J’écris cette relatio (LCO 417 § II, 3°) dans l’horizon de grâce du 8ème centenaire du dies natalis de saint Dominique. Nous remercions Dieu de nous avoir donné saint Dominique de Caleruega parce que le Seigneur a béni sa vie et lui a confié une mission exceptionnelle. Tout comme le pape Benoît XV avait écrit l’encyclique Fausto appetente die à l’occasion du 7ème centenaire du dies natalis de saint Dominique en 1921, le pape François a écrit une lettre à l’Ordre (24 mai 2021) en cette année jubilaire. Le Saint Père a noté que « parmi les titres attribués à saint Dominique, Praedicator gratiae, est remarquable par sa consonance avec le charisme et la mission de l’Ordre fondé par lui. » (PG 1).
- Le jubilé de saint Dominique est étroitement lié à la commémoration du 8ème centenaire des premiers chapitres généraux célébrés à la Pentecôte 1220 et 1221. Nous savons que saint Dominique voulait que les frères adoptent le mode de vie des apôtres, y compris la manière apostolique de prendre des décisions : Nous avons décidé, l’Esprit Saint et nous1… (Actes 15,28), pour tout l’Ordre. Cette forme de gouvernement communautaire (LCO VI) que Dominique a donné à l’Ordre est aussi un don pour l’Église, car la mission de l’Ordre est d’aider à construire l’Église, le corps du Christ. Le Saint Père a reconnu que notre forme de gouvernement est « synodale [ce qui] a permis à l’Ordre d’adapter sa vie et sa mission à des contextes historiques changeants tout en maintenant la communion fraternelle » (PG, 6). Cette déclaration prend tout son sens en ce moment où se célèbre le Synode des Évêques (2021-2023) sur le thème « Pour une Église synodale : communion, participation et mission ».
Une période de défis, d’opportunités et d’espérance
- Cependant, cette relatio concerne aussi une période marquée par des défis imprévus et sans précédent. La pandémie a bouleversé nos vies et perturbé nos projets. Nous nous sommes retrouvés à nous demander : comment prêcher en temps de pandémie ? Comment prêcher la proximité de Dieu tout en gardant une distance de sécurité les uns par rapport aux autres ? Comment prêcher la proximité de Dieu aux personnes isolées ? Après avoir fourni aux gens une nourriture spirituelle via internet, comment les inviter à revenir de la communauté virtuelle à la communauté réelle pour célébrer la foi et les sacrements en présentiel ? Comment prêcher l’espérance dans un temps de désespérance ? Dans de nombreux foyers et de nombreuses communautés, y compris dans certains de nos propres couvents, nous avons des sièges et des espaces désormais vides qui nous rappellent les êtres chers que nous avons perdus au cours de ces deux dernières années. Comment prêcher la joie de l’Évangile dans un contexte de perte ?
- En ces temps difficiles, nous avons découvert de multiples manières de prêcher. Nos frères et sœurs ont fait de leur mieux pour nourrir les « faims » intensifiées par la pandémie : faim de l’Eucharistie (et des sacrements), faim de solidarité et de compassion, faim de nourriture et de boisson. Certains membres de la famille dominicaine ont collecté des fonds pour les besoins des malades et de ceux qui prennent soin des malades. Certains frères et sœurs ont offert des mots d’encouragement et d’espérance par le biais de conseils téléphoniques. La plupart des frères et sœurs ont prêché et prié avec les gens par le biais de diverses initiatives numériques. Certains frères ont bravé le danger de la contamination en s’occupant des malades, tout en observant les précautions nécessaires afin d’éviter la transmission virale au sein de leur communauté. Nos frères du monde entier ont publié des réflexions théologiques et bibliques sur les différentes facettes de la pandémie, des guides pour célébrer la liturgie du Triduum pascal à la maison, des directives pour une célébration digne mais sécurisée des sacrements, etc. Quelques-uns, grâce à leur formation médicale ou scientifique ont même partagé leur expertise pour dispenser des soins médicaux ou développer des vaccins peu coûteux et pouvant être stockés facilement. Nous nous souvenons de ce que le fr. Timothy Radcliffe écrivait dans La source vive de l’espérance2 : «Étudier est en soi un acte d’espérance, car cela exprime notre confiance dans le fait que nos vies et les souffrances de notre peuple ont un sens. Et ce sens nous parvient comme un cadeau, une parole d’espérance promettant la vie. » La mission intellectuelle de l’Ordre et sa mission de prêcher la Veritas est un antidote important à une autre pandémie pernicieuse : les « fake news » et les demi-vérités qui sont en fait des demi- mensonges.
- Mais le COVID 19 n’est pas la seule pandémie qui frappe notre monde. L’Église, le corps mystique du Christ, est blessée par des divisions. Comment prêcher l’amitié de Dieu à une époque où nous entendons des gens qui attisent les fractures et les divisions ? Comment prêcher à une époque où sévissent les pandémies pernicieuses de l’indifférence, du cléricalisme, des divisions, des « fake news » et du désespoir ?
- « Nous voulons voir Jésus » (Jean 12,21). C’est le désir des personnes qui écoutent nos prédications, qui viennent dans nos sanctuaires et nos églises, qui s’assoient dans nos salles de cours, qui lisent nos livres, qui visitent nos sites web et écoutent nos podcasts, qui rejoignent les fraternités et les groupes dont nous nous occupons et ceux qui manifestent le désir de nous rejoindre dans l’Ordre. « Nous voulons voir Jésus », tel est, croyons-nous, le désir implicite des gens en tout lieu et de tout temps, y compris le nôtre. Par notre vie apostolique et notre travail (vita apostolica), nous nous efforçons, comme les apôtres, de les accompagner dans leur itinéraire à la rencontre du Seigneur.
- «Ils ont pris mon Seigneur et je ne sais pas où ils l’ont mis» (Jean 20,13). Malheureusement, la plainte de Marie-Madeleine pourrait très bien être celle de ceux qui se sont éloignés de l’Église ou qui sont indifférents et pas du tout intéressés par l’Église. L’analyse de notre frère Francisco de Vitoria sur l’évangélisation de son temps semble si contemporaine : «J’entends parler de nombreux scandales, de crimes cruels et d’actes d’impiété. Par conséquent, il ne semble pas que la religion chrétienne leur ait été prêchée avec suffisamment de bienséance et de piété pour qu’ils soient tenus d’y adhérer. Bien que beaucoup de religieux et d’autres ecclésiastiques semblent, tant par leur vie et leur exemple que par leur prédication diligente, avoir consacré suffisamment de peine et de savoir-faire à cette entreprise, ils en ont été empêchés par d’autres priorités. »3Vitoria laisse entendre que ceux qui persistent dans leur incrédulité ne peuvent être blâmés lorsque l’Évangile n’est pas prêché de manière convaincante.
Restructuration, synergie de vie et de mission
- Comment prêcher de manière convaincante à notre époque ? Certes, nos précédents chapitres généraux ont beaucoup fait pour aider l’Ordre à prêcher l’Évangile de manière efficace, pour fournir des mesures qui, mises ensemble, nous aident à accompagner les gens vers une rencontre authentique avec le Seigneur.
- Depuis 2010, l’Ordre a entamé une restructuration afin d’améliorer notre vie et notre mission. Depuis lors, il y a eu des fusions et des unions d’entités. Les expériences positives et les leçons tirées de ces restructurations servent de guide aux autres entités qui empruntent des voies similaires. Alors que l’Ordre a diminué en certains lieux, il s’est également développé dans d’autres. Depuis 2010, nous avons assisté à la naissance de nouvelles provinces et vice-provinces. Actuellement, nous accompagnons attentivement des frères qui cheminent pour créer de nouvelles vice-provinces en suivant les critères établis par le chapitre général (ACG Biên Hòa, 275).
- Une autre composante importante de la restructuration de l’Ordre est la réorganisation interne prévue par la Ratio Formationis Generalis révisée (2016) qui envisage la formation intégrale d’un prédicateur dans la vie apostolique comme un chemin continu de la formation initiale à la formation permanente ; et la Ratio Studiorum Generalis révisée (2017) qui cherche à promouvoir la « riche tradition selon laquelle l’étude est contemplative, synthétique, enracinée dans le réel, et repose sur la raison informée par la foi. »
- Le renouvellement des structures externes et internes pour une évangélisation plus efficace et renouvelée est un processus continu. Le dernier chapitre général de Biên Hòa a cherché à poursuivre les efforts et à construire sur ces réalisations en réfléchissant et en trouvant des moyens de fortifier la synergie (συνέργια) entre la vie dominicaine et sa mission. Comme le notent les capitulaires : « Dans la vie dominicaine, il existe une relation étroite entre la vie et la mission, de telle sorte qu’il n’y a guère de frontière entre l’une et l’autre. La vie et la mission sont les deux faces d’une même médaille. Elles se conditionnent et s’influencent mutuellement. Lorsque la mission est vivante, la vie des frères et des communautés est stimulée. » (ACG Biên Hòa 2019, 58-59). Le frère Bruno a souligné que la force d’une province ne repose pas uniquement sur son histoire glorieuse et sa tradition vénérable, ni sur le nombre de ses frères, mais bien plutôt sur tout cela « en synergie avec le témoignage d’une communauté évangélique fraternelle, souvent intergénérationnelle » (Relatio 2019, 15).
Vision et tâches pour l’avenir
- Que devons-nous faire de plus ? En effet, la restructuration, la formation et la mission, la synergie des dimensions contemplatives et apostoliques de notre vie sont des tâches sans fin. Mais à partir de la situation actuelle, dans quelle direction faut-il aller ? Comment imaginons-nous l’Ordre dans son service de l’Église et du monde dans trois ou six ans ? Une vision claire est la condition est une condition nécessaire pour donner une unité et un but aux décisions que nous prendrons lors des chapitres généraux de 2022 et 2025. (Nous rappelons que « la fin est dernière dans l’ordre de l’exécution, mais elle est première dans l’ordre de l’intention » – Summa Theologiae Ia-IIae, q.1, resp.1). Cette vision ou ce but déterminera notre itinéraire, le chemin que nous allons prendre dans les années à venir. Elle donnera une cohérence aux programmes et aux projets que nous adopterons. Elle nous donnera une base objective pour évaluer si les décisions que nous avons prises et les mesures que nous avons adoptées nous aident à atteindre notre but, ou si nous devons les réviser ou faire quelque chose de plus.
- La présente relatio et même les chapitres généraux passés parlent des frères, des structures et des orientations qui influencent notre vie dominicaine et notre ministère. En d’autres termes, ces documents concernent davantage notre vie et notre mission et les conditions de leur possibilité, mais pas les sujets de notre prédication, les personnes que nous servons ou l’efficacité de notre témoignage et de notre prédication. Certes, « tout ce qui peut se compter ne compte pas », mais il serait sûrement utile aux « décideurs » – chapitres provinciaux et chapitres généraux – d’avoir un « système d’évaluation » qui prenne sérieusement en compte les sujets de notre prédication. Beaucoup de choses pourraient changer, je crois, si nous orientions « délibérément » notre ministère ou notre prédication auprès de nos fidèles afin qu’ils deviennent eux-aussi des acteurs ou des agents d’évangélisation (cf. ACG Biên Hòa 2019, 140). À titre d’illustration, nous pouvons regarder comment les bancs de nos églises conventuelles ou paroissiales sont remplis (quantité) ou nous pouvons regarder comment les personnes qui viennent dans nos églises grandissent dans leur foi et deviennent elles-mêmes des «disciples- missionnaires ». Ou bien, nous pouvons regarder comment le nombre d’étudiants dans nos facultés, écoles et universités ecclésiastiques a augmenté ces dernières années, ce qui est un signe de bonne réputation, ou bien nous pouvons, en même temps, nous concentrer sur la façon dont nos programmes et nos cursus contribuent à former des diplômés qui sont eux-mêmes des prédicateurs crédibles de l’Évangile. Il ne s’agit pas de prôner une sorte de « révolution copernicienne », c’est-à-dire de déplacer notre centre d’attention de nous-mêmes vers les personnes que nous servons, mais de nous inviter à prendre suffisamment en compte les deux points focaux : nous-mêmes et les personnes que nous servons.
- Le but immuable de notre prédication est le salut des âmes. Le but de la formation chrétienne que nous offrons dans nos écoles, nos paroisses, nos centres apostoliques et par d’autres ministères de prédication est la formation du Christ en chacun de nous : “donec formetur Christus in vobis [nobis]” (Gal 4,19). Mais si nous précisions nos objectifs, à savoir : qu’espérons-nous qu’il advienne de nos paroissiens, de nos étudiants, etc. afin qu’ils ne restent pas de simples récepteurs passifs mais qu’ils se transforment pour être agents d’évangélisation, «disciples-missionnaires» ou «contemplatifs-évangélisateurs», cela nous aiderait sûrement à donner une direction plus claire à notre prédication, aux programmes d’étude de nos écoles et aux nouveaux projets pour nos activités apostoliques.
- Nous savons que nous n’avons pas besoin de « réinventer » l’Ordre chaque fois que nous célébrons un chapitre général. Il est vrai qu’il serait intéressant de « chanter une nouvelle chanson », mais parfois nous avons simplement besoin de chanter la même chanson dans une « autre tonalité » ou avec une plus grande harmonie. Nous devons trouver de nouvelles perspectives pour prêcher le même Evangile dans des contextes et des cultures changeants. Il y a 44 ans que le chapitre général a identifié les quatre priorités de l’Ordre (Quezon City, 1977) ; 35 ans que le chapitre général a défini les cinq frontières de l’évangélisation (Avila, 1986) ; 11 ans que le chapitre général a élaboré les mandats de mission (Rome, 2010) qui ont évolué vers les forums actuels de la vie apostolique. Est-il temps de revoir et de mettre à jour les priorités de l’Ordre ? Ou peut-être avons-nous simplement besoin de rappeler à l’Ordre que ces priorités restent les nôtres et qu’elles doivent donc être sérieusement prises en compte dans nos différents apostolats. Comment ces priorités sont-elles intégrées en tant que « priorités » dans chacun des Forums pour la Vie Apostolique ? Par exemple, la priorité de Justice et Paix est clairement au cœur du forum sur le Processus de Salamanque, mais comment est-elle une « priorité » dans le forum sur la pastorale en paroisse ou pour les artistes, etc. Qu’en est-il des « frontières de l’évangélisation » ? Sont-elles toujours pertinentes aujourd’hui ? Y a-t-il de nouvelles frontières qui reviennent sans cesse lors des chapitres généraux et que nous n’avons pas explicitement identifiées comme des « frontières » ? Dans de nombreuses régions du monde aujourd’hui, le lieu de la mission n’est plus seulement celui qui est loin de chez soi, il est aussi tout près de chez soi ! En franchissant le seuil (« frontière ») de nos couvents, nous rencontrons déjà « beaucoup d’hommes, de femmes et d’enfants qui ne connaissent pas la joie de l’amitié avec Jésus ».
Les frères
- Il y a 5.117 frères profès, selon les statistiques de 2020. Parmi eux, 737 sont des frères étudiants clercs, 116 diacres en vue du sacerdoce, 15 diacres permanents, 245 frères coopérateurs, 4.023 prêtres et 41 évêques. Nous avons 164 novices en vue du sacerdoce et 5 novices qui souhaitent être coopérateurs.
- La même année, 155 frères sont décédés (dont 42 à cause du COVID 19), 15 prêtres ont quitté l’Ordre (dispenses et incardinations), 12 frères profès solennels ont obtenu une dispense et 38 frères profès simples ont quitté l’Ordre. Il y a 49 frères qui sont en exclaustration et 59 sont signalés comme étant illégitimement absents.
- En ce qui concerne l’assignation, 78% des frères vivent dans 257 couvents, tandis que 22% vivent dans 281 maisons. Par groupes d’âge, 11% ont 30 ans et moins, 18% ont entre 31 et 40 ans ; 19% ont entre 41 et 50 ans ; 15% ont entre 51 et 60 ans ; 13% ont entre 61 et 70 ans ; et 24% ont 71 ans et plus.
- Les frères sont présents dans 37 provinces et 6 vice-provinces. Parmi ces provinces, 2 sont en Afrique, 5 en Asie-Pacifique, 20 en Europe (9 dans la péninsule ibérique, en Italie, en Bohème, en Croatie, à Malte et en Slovaquie ; 11 en Europe du Nord-Ouest, au Canada et en Pologne), 6 en Amérique latine et aux Caraïbes et 4 aux États-Unis d’Amérique. Parmi les six vice-provinces, 2 se trouvent en Afrique, 2 en Asie-Pacifique, et 2 en Amérique latine et aux Caraïbes. Dix provinces ont 18 vicariats provinciaux qui sont présents en Afrique (4), Asie-Pacifique (4), Europe-Canada (6), Amérique latine (4).
- En 1921, à l’occasion du 7ème centenaire de saint Dominique, l’Analecta enregistrait 4.737 frères (in hac summa solummodo sacerdotes, clerici novitii necnon conversi computantur) et 946 frères coopérateurs (conversi). Nos effectifs n’ont pas changé de façon spectaculaire au cours des cent dernières années. Ce qui a changé, c’est la répartition géographique des frères, de l’Europe et des Amériques à l’Afrique et à l’Asie-Pacifique.
- En ce qui concerne le changement de la répartition géographique, on m’a demandé à plusieurs reprises si les provinces ayant un plus grand nombre de frères pouvaient aider les provinces ayant moins de frères à maintenir une présence dominicaine et la prédication sur leurs territoires. J’ai fait remarquer que le LCO 391, nn. 5 & 6 (couvents inter- provinciaux et assignation « providentielle ») fournissent les conditions pour cette possibilité. Cependant, une préparation attentive des frères qui seront impliqués dans ces projets de collaboration doit inclure de façon adéquate les dimensions de la langue et de l’interculturalité, c’est-à-dire la capacité et la volonté de franchir les frontières, de s’éloigner de ses habitudes culturelles et d’avoir l’opportunité de mieux connaître l’autre culture, d’être prêt à s’intégrer pleinement dans la vie et la mission de sa communauté d’assignation. L’interculturalité est d’abord marquée par le respect de la culture de l’autre, mais doit le dépasser pour viser la convivialité et la réciprocité. La convivialité se réfère à un modus vivendi de solidarité et de réciprocité qui conduit à l’épanouissement d’une vie fraternelle commune au milieu de la diversité. La réciprocité signifie que nous devons être assez généreux pour donner, mais assez humbles pour recevoir.
La curie généralice
- La curie généralice est une communauté qui sert la mission de l’Ordre et dirige la Famille dominicaine en l’accompagnant dans le service et l’accomplissement de cette même mission. La mission unique de l’Ordre, au sein de l’Église, est clairement discernable depuis le moment de sa fondation lorsque Dominique a envoyé les frères étudier, prêcher et établir des communautés.4 Ainsi, le cœur du service collectif (diakonia) assuré par la curie généralice est de promouvoir cette triple mission, même s’il y a des membres qui, comme l’indique le titre de leurs fonctions respectives, sont chargés d’une mission spécifique.
- Afin d’assurer son bon fonctionnement, la curie a rédigé un Manuel administratif qui rassemble les différents statuts, politiques et procédures utilisées par la curie généralice au fil des ans. Il inclut un organigramme (voir annexe), la description des différents emplois et d’autres documents connexes qui définissent l’étendue du travail et les domaines de collaboration entre les membres de la curie. Il s’agit d’un vade-mecum qui, nous l’espérons, aidera les membres de la curie à assurer de manière plus cohérente et efficace leur service à l’Ordre. Il est également destiné à faciliter le transfert de responsabilités entre un membre en exercice et un nouveau membre. L’édition 2021 du Liber Constitutionum et Ordinationum a été publiée. Elle contient toutes les modifications apportées jusqu’au chapitre général de Biên Hòa célébré en 2019.
- Dans sa relatio de fin de mandat, le frère Bruno Cadoré a indiqué la nécessité de revoir la répartition des socii régionaux. Les provinciaux d’Europe ont été consultés lors de leur réunion IEOP en 2020. Ils ont proposé de réduire le nombre de socii pour l’Europe de trois à deux et ont demandé à avoir une discussion plus approfondie sur la façon dont les deux socii pourraient partager leurs responsabilités en l’Europe. Afin d’aller dans la direction proposée par les provinciaux d’Europe, aucun socius régional pour l’Europe centrale et orientale n’a été nommé à l’expiration du mandat du fr. Krzysztof Popławsk. Les frères Alain Arnould et Miguel Ángel del Rio restent les deux socii pour l’Europe, avec des provinces supplémentaires confiées à leurs soins.
- L’une des nouvelles opportunités offertes pendant la pandémie est la possibilité de mener des réunions sur des plateformes purement numériques ou hybrides. Bien sûr, les réunions en présentiel restent le meilleur moyen de discuter et de prendre des décisions. Toutefois, certaines réunions de commissions et d’autres structures de collaboration peuvent se dérouler efficacement sur des plateformes numériques qui permettent de réduire les dépenses et l’empreinte carbone, sans sacrifier l’efficacité. Les réunions régionales de novices de toutes les régions sont sans précédent. Elles étaient inimaginables avant la généralisation des réunions en ligne.
Vie fraternelle et formation
- Une des décisions importantes prises par les deux derniers chapitres généraux a été l’institution d’un socius pour la vie fraternelle et la formation, dont je recommande vivement la confirmation par le prochain chapitre général [LCO 425 § II (B 306), LCO 427- bis (B 307) et LCO 429 § II (B 308)].
Frères coopérateurs
- Conformément à l’ACG 2019 Biên Hòa, 199, la Commission théologique sur la vocation du frère coopérateur dans l’Ordre et dans l’Église a été constituée. La commission concentrera sa réflexion théologique sur la vocation spécifique de chaque branche de la Famille dominicaine dans le contexte plus large de l’Église qui est une communion ordonnée. Ce changement d’orientation évitera la répétition d’études importantes portant sur les frères coopérateurs et entreprises par les commissions précédentes. Plus important encore, il s’agira de voir comment la richesse de la vocation dominicaine, illustrée de manière distincte par les différentes branches de la Famille, sert l’Église et le monde. Fr. Vivian Boland, président de la commission, a rédigé le « mandat pour le travail de la commission », mais cette dernière devrait terminer son travail après le chapitre général de Tultenango, Mexico.
- La Commission Permanente pour la Vocation du Frère Coopérateur (ACG 2019 Biên Hòa, 194) s’est réunie à plusieurs reprises avec le socius pour la vie fraternelle et la formation conformément à la mission confiée par le chapitre général. Lors de leur rencontre avec les promoteurs provinciaux des vocations, il est apparu clairement que la promotion de nouvelles vocations de frères coopérateurs a été négligée pour plusieurs raisons, l’une d’entre elles étant la préférence pour les vocations au sacerdoce dominicain en raison d’un besoin de frères ordonnés pour les apostolats des provinces.
Formation permanente
- Dans l’esprit du « partage des meilleures méthodes », la Commission pour la formation permanente (ACG 2019 Biên Hòa, 100) a rassemblé les programmes et les stratégies de certaines provinces sur la façon de gérer les frères qui « perturbent la vie fraternelle par leur comportement dysfonctionnel, leur alcoolisme, etc. » en vue d’une guérison ou d’une réconciliation (ACG 2019 Biên Hòa, 96, 97). Les documents vont être traduits dans les langues officielles de l’Ordre et seront bientôt proposés aux provinces. Le prochain programme à l’ordre du jour de la commission sera celui destiné à « faciliter la communication au sein des communautés et entre les frères ».
- Je crois fermement que la prochaine tâche de la Commission permanente pour la formation est d’examiner les meilleures pratiques des provinces concernant le n° 18 de la Ratio Formationis Generalis : « A chaque étape de la formation initiale et à intervalles réguliers pendant la formation permanente, il doit y avoir une réflexion sérieuse et un partage sur la vie affective et la maturité, la sexualité, le célibat et l’amour chaste (Bologne 1998, n.90). Le chapitre général de Providence a proposé à cette fin un cadre de référence complet (Providence 2001, n. 348-349) et le chapitre général de Trogir l’a approuvé (Trogir 2013, n.142). » Je crois qu’il devrait y avoir une réflexion régulière sur ces thèmes de formation humaine pour tous les frères en formation permanente qui soit adaptée à leur tranche d’âge et qui tienne compte des « transitions de la vie », par exemple une formation permanente pour les frères coopérateurs après 10, 20, 30 ans de profession solennelle, ou une formation permanente sur un thème comme « du vieillissement au sage » (“from ageing to sage–ing”) pour les frères septuagénaires, etc.
- Comment accompagnons-nous les frères qui passent par des moments d'”acédie” que saint Thomas, citant Damascène, décrit comme « une sorte de tristesse lourde… qui pèse sur l’esprit de l’homme de telle sorte qu’aucune activité ne lui plaît » (S. Th. IIa-IIae, q. 35, a. 1), ou que Jean Cassien appelle le « démon de midi » ou ce que l’on nomme « crise de la quarantaine » ? L’Église reconnaît qu’avec « l’aide de la psychologie, éclairée et complétée par l’apport de l’anthropologie de la vocation chrétienne et, donc, de la grâce »5 on peut atteindre la maturité religieuse et vocationnelle. Certaines provinces ont intégré des programmes de formation permanente dans ce sens. Le socius pour la formation permanente travaille sur la manière de fournir des moyens pour le « partage des expériences » entre les provinces. Mais cela exige aussi une certaine ouverture pour partager et recevoir de la part des frères, en général, et des promoteurs provinciaux de la formation permanente, en particulier.
Collaboration dans la formation initiale
- Chaque frère que l’Ordre accepte pour la formation a le droit et le devoir de faire l’expérience d’une vie dominicaine complète qui, espérons-le, le conduira à un engagement perpétuel dans cette vie. On nous a enseigné en formation comment les éléments de la vie dominicaine, la prière commune, la vie fraternelle commune, le gouvernement communautaire, etc. sont des éléments constitutifs de notre identité et de notre mission. Nous savons que le nombre de frères dans un couvent ne garantit pas, à lui seul, une vie dominicaine pleinement satisfaisante, mais le nombre de frères vivant habituellement dans le même couvent est une condition importante pour permettre d’assurer le mode de vie d’un prédicateur. Je crois que fournir de telles conditions est, dans une certaine mesure, une question de justice : chaque frère que nous acceptons pour la formation a le droit de recevoir une authentique formation dominicaine.
- Comment pouvons-nous offrir une formation dominicaine authentique si un ou plusieurs éléments de la vie dominicaine font défaut ? Comment un novice peut-il faire l’expérience de la richesse de notre prière liturgique commune si la communauté du noviciat ne compte pas suffisamment de frères ? Comment un frère profès solennel peut-il faire l’expérience d’un gouvernement communautaire complet s’il ne vit pas dans un couvent mais dans une maison où le supérieur est nommé et non élu et où le chapitre est le même que le conseil ? Comment les frères étudiants peuvent-ils être immergés dans la riche tradition philosophique et théologique dominicaine s’ils étudient les disciplines ecclésiastiques dans des facultés qui n’appartiennent pas à l’Ordre ? Selon les statistiques pour l’année 2020, sur les 737 étudiants clercs que nous avons, 498 étudient dans des centres d’études sous la responsabilité de l’Ordre, ce qui signifie que 309 frères étudiants bénéficient de manière minimale de la tradition intellectuelle de l’Ordre. Pour cette raison, il est nécessaire d’avoir des centres de formation au sein des régions. En Afrique, la collaboration en matière de formation est, je crois, l’une des meilleures pratiques que les autres régions peuvent imiter. Une province qui ne peut pas fournir, dans les deux ans, les caractéristiques qu’une véritable maison de formation, ne devrait-elle pas avoir l’obligation d’envoyer ses frères en formation initiale dans d’autres maisons de formation (cf. LCO 254,2) ?
Commission liturgique
- La Commission liturgique, en plus de son mandat de promotion de la vie liturgique et de prière dans l’Ordre, a été chargée de collaborer avec le Postulateur général afin de fournir à l’Ordre les textes liturgiques appropriés pour les nouveaux saints et bienheureux comme saint Bartolomeu dos Mártires (Barthélemy de Braga), le bienheureux Jean-Joseph Lataste et autres, et de discuter avec le postulateur des étapes essentielles à suivre pour atteindre ce but.
- La Commission liturgique est assistée par une sous-commission pour la musique dont la tâche principale est d’aider la Commission liturgique à promouvoir la riche diversité de la musique dominicaine dans toute la famille dominicaine et la tâche secondaire est de coopérer avec les provinces francophones afin de sauvegarder et de promouvoir la Liturgie Chorale du Peuple de Dieu du frère André Gouzes (ACG 2019, n. 102).
Vie intellectuelle et études
- Une information complète sur la vie d’étude et la vie intellectuelle dans l’Ordre est désormais accessible en ligne sur https://studium.op.org. Grâce au travail du socius pour la vie intellectuelle, on peut trouver (a) des informations sur les centres d’études et les institutions académiques de l’Ordre (b) un répertoire des personnes travaillant à l’animation de la vie intellectuelle dans les différentes instances de l’Ordre (Commission permanente pour la promotion des études dans l’Ordre, secrétariat pour la vie intellectuelle, régents des études, modérateurs des centres d’études institutionnels, professeurs, frères qui se préparent à l’enseignement et frères ayant reçu le titre de magistri in sacra theologia (c), la collaboration au sein des régions, (d) les bourses d’études (e) les publications, etc. Une partie du site est consacrée à la publication des postes d’enseignement vacants pour l’information des frères intéressés et qualifiés.
- Le réseau des universités dominicaines a tenu sa première réunion en ligne les 27 et 28 juillet 2021. Les résultats de la réunion et les réponses au questionnaire ont été présentés au Conseil général. Les membres du groupe de travail du réseau des universités OP (UNOP-RUOP) ont ensuite été nommés avec les tâches suivantes : (a) revoir et affiner le projet de statuts du réseau qui sera soumis dès qu’il sera prêt (mais au plus tard le 11 février 2022) au Maître de l’Ordre et au Conseil général pour approbation (ad experimentum pour 5 ans) ; (b) identifier les principaux domaines de collaboration des membres du réseau et formuler le système ou la procédure de base pour mettre en œuvre la collaboration dans chaque domaine.
Actuellement, l’Ordre compte 12 universités, 11 facultés de théologie (dont 8 sont sui juris), 7 instituts d’études supérieures et 9 institutions de recherche académique.
Centres académiques et maisons sous la juridiction directe du Maître de l’Ordre
- Université pontificale de Saint-Thomas (PUST Angelicum)
- Les statuts révisés de la PUST ont été approuvés par le Saint-Siège, promulgués et sont entrés en vigueur le 14 septembre 2021. Le même jour, le nouveau recteur de l’université, fr. Thomas Joseph White, a formellement pris ses fonctions après avoir fait sa profession de foi. Les nouveaux membres du Conseil d’administration ont été nommés conformément aux nouveaux statuts.
- Les projets de développement initiés par fr. Bruno portent leurs fruits et ont inspiré une confiance renouvelée envers l’Université. Cinquante-huit frères sont inscrits pour cette année universitaire (2021-2022). Ils viennent de 22 provinces et vice-provinces du monde entier. Depuis 2019, cinq professeurs dominicains ont été affectés à l’Angelicum.
- Dans sa planification stratégique, l’Angelicum vise à développer et à renforcer son rôle en tant que centre d’excellence académique dans les domaines de l’enseignement, de la recherche et de la formation spirituelle, conformément à la tradition dominicaine. Son offre de bourses d’études vise à contribuer à la construction des Églises particulières et des entités de l’Ordre dans les différentes régions du monde en formant leurs futurs dirigeants, enseignants et ministres afin qu’ils puissent développer leur mission d’évangélisation et de dialogue fructueux avec les cultures et les religions.
- L’École Biblique et Archéologique Française (EBAF)
- Depuis 2019, deux nouveaux professeurs dominicains ont été affectés à l’EBAF. L’École a commencé sa planification stratégique que nous espérons pouvoir examiner lors de la visite canonique de janvier 2022. L’EBAF continue d’être un centre renommé d’études bibliques et apporte inspiration et soutien aux frères qui se spécialisent dans les études bibliques.
- L’Albertinum/Faculté de théologie de Fribourg
- Depuis 2019, un professeur dominicain a été affecté à l’Albertinum, avec la possibilité d’en affecter un autre une fois que l’université aura nommé le frère concerné comme président. Le projet de créer un Institut dominicain au sein de la Faculté de théologie prend progressivement forme et, espérons-le, recevra l’approbation des autorités compétentes.
- La Commission Léonine
- Depuis 2019, un nouveau frère a été nommé comme membre de la Commission Léonine. Un mémorandum de collaboration de la Commission avec l’Institut historique de l’Ordre est en cours. La Commission léonine va travailler à établir des liens plus importants avec les Instituts thomistes de plusieurs provinces.
La vie apostolique
- Les membres du Secrétariat pour la Vie Apostolique, composé des promoteurs généraux et du socius pour la vie apostolique qui en assure la présidence, collaborent étroitement par le biais de réunions régulières.
Les forums pour la vie apostolique sont dynamisés par diverses rencontres régionales des frères impliqués dans chaque forum. L’objectif du forum est « d’encourager l’activité apostolique par le partage d’expérience entre les frères impliqués, en mettant à profit la tradition spécifique de l’Ordre pour ces activités apostoliques, et de stimuler le dialogue entre les pasteurs et les théologiens de l’Ordre » (Relatio MO, ACG Bologne 2016, n. 104). À l’heure actuelle, il existe 13 forums apostoliques. Le processus de construction de réseaux entre les frères de l’Ordre qui travaillent dans des domaines de mission identiques ou similaires est en cours. Les forums constituent une réponse à la commission du chapitre général de Trogir en 2013 (n. 109). Le socius pour la vie apostolique et les socii régionaux continuent à organiser des rencontres en ligne pour les frères qui travaillent dans le domaine de la communication médiatique, pour les fraternités dominicaines, pour la promotion du Rosaire et pour la pastorale en paroisse.
- Créer un profil apostolique détaillé des entités de l’Ordre a été une tâche ardue. Une base de données des personnes et des structures est également en cours de construction. Elle a été réalisée à partir des informations fournies à la curie généralice par les provinces et les vice-provinces, par le biais des catalogues, des bulletins d’information et autres moyens de communication. Elle sera un outil fondamental pour les réseaux de frères et les institutions à travers lesquelles ils exercent leurs ministères. En outre, des plates-formes de communication et de collaboration permanentes (workplace, google suite) sont actuellement utilisées par les forums sur (1) le Rosaire, les sanctuaires et les pèlerinages, (2) les promoteurs des fraternités laïques, (3) la pastorale paroissiale et (4) les promoteurs pour les médias. Les autres forums seront introduits dans les mois à venir.
- Pour développer de nouveaux forums apostoliques, je crois qu’il sera important d’examiner attentivement comment notre charisme enrichit un forum apostolique donné. Par exemple, qu’est-ce qui fait qu’une paroisse confiée à nos soins est vraiment « dominicaine » ? S’agit-il de la visibilité des symboles dominicains dans l’église paroissiale ou de la célébration des fêtes dominicaines par la communauté ? N’est-il pas possible d’imaginer que la communauté des frères à laquelle appartient le curé soit celle qui veille sur « le troupeau paroissial » (cf. ACG Rome 2010, n. 183 ; ACG Bologna 2016, n. 114) ? À cet égard, il est important de considérer l’instruction La conversion pastorale de la communauté paroissiale : au service de la mission évangélisatrice de l’Eglise publiée par le Saint-Siège : « La contribution que les hommes et les femmes consacrés peuvent apporter à la mission évangélisatrice de la communauté paroissiale [de l’Eglise] dérive d’abord de leur “être”, c’est-à-dire du témoignage d’une suite radicale du Christ par le moyen de la profession des conseils évangéliques, et seulement ensuite de leur “agir”, c’est-à-dire par des œuvres accomplies conformément au charisme de chaque institut »6 Cette reconnaissance de l’importance des charismes religieux dans l’enrichissement de la pastorale paroissiale est très importante car les paroisses confiées aux soins de l’Ordre sont nombreuses, 30 paroisses en Afrique et 80 paroisses en Asie-Pacifique (le socius pour la vie apostolique est en train de collecter les données pour les autres régions).
Justice, paix et sauvegarde de la création
- Témoignerde l’amour et de la miséricorde du Christ en œuvrant pour la justice, la paix et la sauvegarde de la création fait partie de l’évangélisation et nécessite une “organisation”. Nous rappelons que lorsque saint Dominique fut ému de compassion pour ceux qui souffraient lors d’une famine, il ne se contenta pas de vendre ses précieux livres. Il « établit un centre d’aumône… » qui inspira d’autres personnes à faire de même (Libellus, 10). C’est dans le même esprit qu’a été promulgué « Le rôle des promoteurs de la justice, de la paix et du soin de la création dans l’Ordre » comme le demandait l’ACG Biên Hòa, 175.
- Le « Coordinateur du Programme d’Engagement Académique » de la Délégation de l’ONU a été nommé pour servir comme membre du groupe de travail identifié dans ACG Biên Hòa 2019, 317 et pour informer les institutions et les universitaires dominicains sur le travail que l’Ordre accomplit à l’ONU et les encourager à produire des réflexions, soit individuellement soit collectivement, qui renforceront les possibilités de surmonter les clivages découlant des conflits de droits et d’autres questions concernant les droits de l’homme, à la lumière du Processus de Salamanque.
- Les récentes encycliques sociales mettent clairement en évidence le lien entre la promotion de la justice, de la paix et le s oin de la création : « De même que les vertus humaines sont connexes, si bien que l’affaiblissement de l’une met en danger les autres, ainsi le système écologique s’appuie sur le respect d’un projet qui concerne aussi bien la saine coexistence dans la société que le bon rapport avec la nature. (Caritas in Veritate, 51). Ainsi, « une vraie approche écologique se transforme toujours en une approche sociale, qui doit intégrer la justice dans les discussions sur l’environnement, pour écouter tant la clameur de la terre que la clameur des pauvres » (Laudato Si, 49). L‘un des principaux défis des promoteurs est de savoir comment promouvoir la justice, la paix et le soin de la création au sein de l’Ordre.
- Pourtant, il semble que certains dominicains ne trouvent pas attrayant le travail pour la Justice et la Paix. Est-ce parce que nous ne trouvons pas la « joie de l’Évangile », Evangelii gaudium, dans la prédication de la justice et de la paix ? Il est clair que les situations d’injustice nous déstabilisent, provoquent des pensées et des sentiments négatifs, voire suscitent la colère ou l’indignation dans nos cœurs. Malheureusement, il y a eu des religieux et des clercs qui, dans leur sollicitude pastorale pour les personnes qui souffrent d’une terrible injustice, ont été consumés par la colère. Peut-être que cette perspective négative d’une colère qui pourrait submerger la joie de l’Évangile nous fait hésiter à nous engager dans le travail pour le rétablissement de la justice et l’obtention d’une paix véritable dans notre monde.
- Une autre « appréhension » pour d’autres dominicains qui hésitent à s’engager dans le travail pour la justice et la paix est probablement que cela pourrait inévitablement les conduire dans la « rue », dans un monde désordonné et séculier et les éloigner de notre vie conventuelle. S’il est vrai qu’il y a eu quelques cas regrettables de frères qui ont cédé à l’activisme et se sont alors éloignés de la vie commune, on ne peut pas penser carrément que travailler activement pour la justice et la paix s’opposerait à la vie contemplative. Il est intéressant de noter que les figures emblématiques du travail de notre Ordre pour la justice et la paix, les frères qui se sont rendus à Hispaniola en 1510, « venaient du groupe des Observants de la province de Castille qui luttaient contre la sécularisation depuis 1450 et qui voulaient restaurer le charisme originel de l’Ordre”7. Il est évident que ces frères avaient une vie conventuelle forte, fidèle aux observances religieuses, mais ils n’étaient pas enfermés sur eux-mêmes. Ils étaient très conscients de la souffrance des gens, en ont été affectés et se sont impliqués.
Promotion du Rosaire
- Le promoteur général du Rosaire organise une réunion en ligne avec les promoteurs du Rosaire de différentes provinces. Il encourage activement la croissance des Confréries du Rosaire et a reçu des réponses positives d’Amérique du Nord. Une centaine de personnes le rejoignent en ligne pour sa prière hebdomadaire du rosaire en direct. Il a récemment publié un livre pour prier le rosaire avec l’art sacré.
Santa Maria Maggiore
- Le couvent de Santa Maria Maggiore est également un collège de pénitenciers. Les frères, dont le ministère principal est de garder ouverte la « porte de la miséricorde », accomplissent un service important de l’Ordre pour l’Église. Un frère sera affecté au couvent d’ici la fin de l’année 2021 et, si tout va bien, deux autres frères viendront le rejoindre l’année prochaine.
Médias
- La visibilité de l’Ordre sur Internet par le biais de son site web s’est beaucoup améliorée au cours de l’année dernière. Les ressources et les liens du site web fournissent des informations utiles et pertinentes sur l’Ordre. Le promoteur collabore étroitement avec un comité de rédaction qui suit un ensemble clair de directives éditoriales pour assurer la cohérence des plateformes de communication de l’Ordre. Le promoteur général des médias s’emploie également à maintenir la visibilité de l’Ordre dans les réseaux de médias sociaux. Cependant, la majeure partie de la présence de l’Ordre sur internet est assurée par des frères et des sœurs du monde entier par le biais de podcasts de prédication, de diffusion en direct de célébrations liturgiques, de conférences en ligne, etc. Peut-on imaginer une plus grande collaboration entre les frères et sœurs qui prêchent sur le continent numérique ? Il va sans dire que l’« assignation Providence » n’est pas nécessaire pour ce type de collaboration.
Membres de la Famille Dominicaine
- Dans Praedicator Gratiae, le Saint Père a salué les branches de la Famille Dominicaine : « les membres de cette grande famille, qui comprend aussi la vie contemplative et les œuvres des moniales et des religieuses apostoliques, les fraternités sacerdotales et laïques, des instituts séculiers et des mouvements de jeunesse » (PG, 1). Dans la même lettre, le Pape rendait hommage au « témoignage discret donné par des milliers de tertiaires dominicains et des membres du Mouvement de la Jeunesse Dominicaine, qui reflète le rôle important et même indispensable du laïcat dans le travail d’évangélisation » (PG, 7).
Moniales dominicaines
- Il y a 2 512 moniales dominicaines vivant dans 185 monastères et un total de 63 novices et 69 postulantes qui se sentent appelées à la vie monastique. Le 26 juin 2021, le plus récent monastère de l’Ordre a été établi à Ilorin, au Nigeria, avec la profession solennelle de 11 moniales et la profession simple de 4 moniales. Ce nouveau monastère dont l’établissement formel a été initié par le Frère Bruno est un signe d’espérance pour la vie contemplative dominicaine, surtout si l’on considère que, depuis 2017, le Saint-Siège a émis des décrets de suppression de 13 monastères. La Commission pour la révision du Livre des Constitutions des moniales (LCM), présidée par le Frère Benjamin Earl, a soumis le projet aux monastères pour consultation. La révision a pour but de mettre à jour le LCM, en particulier à la lumière de Cor Orans, l’instruction d’application de la Constitution Apostolique Vultum Dei Quaerere.
Mouvement des laïcs et des jeunes dominicains
- Selon les informations statistiques de juin 2021, il y a 2.212 fraternités laïques dominicaines avec 128.287 membres dans 75 pays. Par rapport à 2020, il y a une augmentation de 32 fraternités et 749 membres pour l’année 2021. En Europe, il y a 5.377 laïcs dominicains qui appartiennent à 372 fraternités présentes dans 25 pays ; en Amérique latine et aux Caraïbes, il y a 1.862 membres qui appartiennent à 156 fraternités, présentes dans 23 pays ; aux Etats-Unis et au Canada, il y a 2.749 membres appartenant à 164 fraternités présentes dans 2 pays ; en Asie Pacifique, 117.749 membres appartenant à 1.491 fraternités présentes dans 12 pays ; et en Afrique, 550 membres appartenant à 29 fraternités présentes dans 13 pays.
- Le Mouvement International de la Jeunesse Dominicaine compte 4.010 membres appartenant à 144 groupes dans 27 pays. Ces jeunes sont accompagnés par des frères et des sœurs qui servent de promoteurs de la jeunesse.
- Les membres des fraternités laïques sont appelés à communiquer la vérité de la foi. Avec l’institution du ministère de catéchiste (Antiquum Ministerium, 2021), il semble opportun d’encourager les laïcs dominicains, en particulier ceux qui ont le charisme de l’enseignement, à être institués catéchistes. La lettre apostolique instituant le ministère décrit les personnes aptes à ce ministère comme « des hommes et des femmes de foi profonde et de maturité humaine, participant activement à la vie de la communauté chrétienne, capables d’accueillir les autres, d’être généreux et de vivre une vie de communion fraternelle » (AM, 8). Ces qualités ne sont-elles pas celles de tous les laïcs dominicains ?
Fraternités sacerdotales de saint Dominique
- Il y a actuellement dans l’Ordre 410 membres des Fraternités Sacerdotales de Saint Dominique qui sont présentes dans 22 pays. Ces diacres, prêtres et évêques diocésains appartiennent à 19 provinces. Quinze d’entre elles ont 34 fraternités établies ou groupes émergents, tandis que 4 ont des prêtres individuels sans groupe local organisé. En cette année jubilaire, deux cardinaux, un évêque diocésain et un membre de la Curie romaine, ont rejoint une fraternité. Les fraternités de l’Ordre ont continué à rassembler régulièrement leurs membres avec des rites occasionnels d’admission ou de profession des prêtres. Cependant, ces activités ont été perturbées depuis le début de la pandémie mondiale. Les réunions en présentiel étant gravement affectées par les restrictions de voyage et les protocoles sanitaires, les rencontres régulières des membres des fraternités ont été soit reportées, soit transférées sur une plateforme en ligne.
Sœurs dominicaines internationales
- La Confédération internationale des sœurs dominicaines (CIDD) est une structure de collaboration entre les sœurs apostoliques dominicaines du monde entier. Elle a été officiellement reconnue par la Congrégation pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique en février 2019. Elle a son siège à Santa Sabina à Rome.
La DSIC comprend 19.407 sœurs présentes dans 109 pays. Les maisons généralices de ces congrégations sont présentes sur tous les continents : 6 en Afrique, 22 en Asie-Pacifique, 80 en Europe, 19 en Amérique latine et aux Caraïbes et 20 en Amérique du Nord.
Postulation générale
- Par la grâce de Dieu, source de toute sainteté, deux membres de l’Ordre ont été élevés au rang des saints au cours des trois dernières années : saint Bartolomeu dos Martires, « le saint évêque du Concile de Trente », le 10 novembre 2019 à Braga, au Portugal (approbation de la canonisation équipollente le 5 juillet 2019) et sainte Margherita da Città di Castello, patronne des aveugles et des personnes handicapées (PWD), le 19 septembre 2021 à Città di Castello (approbation de la canonisation équipollente le 24 avril 2021).
- A ce jour, la famille dominicaine compte 74 saints (dont 51 martyrs) et 315 bienheureux (dont 222 martyrs). Les saints et bienheureux de l’Ordre sont donc au nombre de 389. Notre calendrier liturgique est presque complètement rempli de fêtes et de commémorations, alors pourquoi continuons-nous à promouvoir des causes de sainteté ? Nous le faisons parce que, comme l’ont dit le frère Bruno Cadoré et le frère Gianni Festa, ancien postulateur général, nous le rappellent : « la sainteté de ces frères et sœurs est un signe visible de la vitalité et de la pertinence de l’Ordre ! ». La canonisation de nouveaux saints représente pour nous tous une confirmation renouvelée que la vie dominicaine, dans toute sa plénitude et sa richesse, est vraiment un chemin de sainteté.
Conclusion
- Cette relatio s’inscrit dans la continuité de la relatio globale que mon prédécesseur, le fr. Bruno Cadoré, a envoyée à l’Ordre à la fin de son mandat. Elle est également complétée par les rapports que les socii et les promoteurs généraux ont soumis au chapitre général. Empêchés par les restrictions de voyage, les membres de la curie généralice et moi-même n’avons pas pu effectuer les visites canoniques habituelles qui nous auraient donné l’occasion dRelatio du Maître de l’Ordre au Chapitre général de Tultenango juillet 2022 e connaître plus profondément les frères et leur apostolat. Cette limitation a certainement porté atteinte à l’exhaustivité qu’un rapport devrait avoir.
frère Gerard Francisco Timoner III, OP Maître de l’Ordre
Santa Sabina, Rome
Solennité de l’Immaculée Conception
8 décembre 2021